Départ pour la Chine - août 1872

Port de Brindisi 04.jpg
journal Albert août 1872-01.jpg
journal Albert août 1872-02.jpg
journal Albert août 1872-03.jpg
journal Albert août 1872-04.jpg
journal Albert août 1872-05.jpg
journal Albert août 1872-06.jpg
journal Albert août 1872-07.jpg
journal Albert août 1872-08.jpg
journal Albert août 1872-09.jpg
journal Albert août 1872-10.jpg
journal Albert août 1872-11.jpg
journal Albert août 1872-12.jpg
journal Albert août 1872-13.jpg
journal Albert août 1872-14.jpg
journal Albert août 1872-15.jpg
journal Albert août 1872-16.jpg
journal Albert août 1872-17.jpg
journal Albert août 1872-18.jpg
journal Albert août 1872-19.jpg
journal Albert août 1872-20.jpg
journal Albert août 1872-21.jpg
journal Albert août 1872-22.jpg
journal Albert août 1872-23.jpg
journal Albert août 1872-24.jpg
journal Albert août 1872-25.jpg
journal Albert août 1872-26.jpg
journal Albert août 1872-27.jpg
journal Albert août 1872-28.jpg
journal Albert août 1872-29.jpg
journal Albert août 1872-30.jpg
journal Albert août 1872-31.jpg
journal Albert août 1872-32.jpg
journal Albert août 1872-33.jpg
journal Albert août 1872-34.jpg
journal Albert août 1872-35.jpg
journal Albert août 1872-36.jpg
journal Albert août 1872-37.jpg
journal Albert août 1872-38.jpg
journal Albert août 1872-39.jpg
journal Albert août 1872-40.jpg

Dublin Core

Titre

Départ pour la Chine - août 1872

Date

08/1872

Résumé

En août 1872, Albert quitte la France pour aller prendre son poste aux Douanes Chinoises.

Après un long trajet en train, une audience au Vatican, il s'embarque à Brindisi et écrit chaque jour à sa mère des lettres très détaillées... qui forment au total un magnifique journal de voyage, fort bien écrit.

Une dizaine de pages seulement ont été transcrites... sur les 112 existantes.

Contributeur

Laurent, Jeanne

Lettres Item Type Metadata

Location

Rome - Italie

Expediteur

Albert

Destinataire

Mathilde

Transcription

Vendredi 4 août 1872            Rome : Albergo della Minerva

Chère petite mère,
Quoique légèrement fatigué, je veux cependant causer quelque peu avec vous avant de me jeter dans mon lit et d’autant plus que je crois avoir fort peu de temps demain pour continuer mon journal. Je reprends à Turin.


Jeudi 3 août 1872                 Turin

Nous partons de Turin après une bonne nuit à 6 h 40 du matin avec l’agréable perspective de 24 h de panier à salade avant d’arriver à Rome, mais la beauté du pays nous fait oublier peu à peu par ses beautés croissantes cette rude perspective ; nous voici, roulant dans la région des vignes mais tout d’abord avec un brouillard tel qu’on se croirait à Londres, peu à peu il se dissipe et nous pouvons voir les montagnes s’effacer et la plaine se dévider avec une platitude terrible ; les vignes s’étendent à perte de vue.

Tout d’abord cultivées à peu près comme en France ; sur de longues perches sur 3 rangs en éventail entre ces rangs on cultive « les canuba » chanvre ou autre chose ; peu à peu les perches mobiles et enlevées en hiver sont remplacées par des poteaux inamovibles ce sont des lignes immensément longues de jeunes ormeaux taillés en fourches. Les vignes grimpent le long et s’allongeant à mesure que nous descendons au sud elles finissent par se suspendre en festons entre les arbres laissant croître au-dessous tout ce qu’on veut bien y planter. A Bologne, nous nous dirigeons sur les Apennins que nous allons gravir … (ligne bas de page illisible)

Nous montons traînés par les machines traversons 20 tunnels avant d’arriver au sommet faisant des lacets tournants impossibles et montant au petit pas. Les Apennins sont moins écrasants que les Alpes ils sont d’ailleurs cultivés jusqu’au sommet des maisonnettes, églises, châteaux sont serrés ça et là et dans les gorges les plus sauvages vous apercevez le feu d’un charbonnier les châtaigniers remplacent la noire et sombre verdure des pins alpestres les plans sont plus espacés la lumière plus vive, ici on juge de la hauteur et l’œil jouit des teintes et du paysage ou encore en louche d’admiration lorsque côtoyant la route des mulets on voit tout à coup le torrent le Aveno qui coule sur une plage de galets murmurant et blanchissant dans son lit aujourd’hui demi-sec dans quelques mois effrayamment large.

Enfin arrivés à Parrochia au fond d’un cirque nous laissons une machine et nous précipitons avec une vitesse effrayante décrivant des courbes non moins rassurantes sur la saillie de Pistoie traversant à toute vapeur 25 autres tunnels de longueurs très variées, des ponts et des viaducs de toute espèce. Les freins grincent la graisse bout avec bruit sur le fer qui chauffe au point de lancer de fortes étincelles et de rôtir les wagons qui sentent fortement la peinture brûlée. Effrayée, une dame fait des signaux de détresse, le train s’arrête et, après avoir préalablement refroidi les freins et les moyeux avec de l’eau froide, on constate que le train n’est pas encore en flammes.

Les nombreux Anglais reprennent impassiblement la lecture de leur « guide » au lieu de regarder l’admirable spectacle qui se déroule sous nos yeux ; ces gens-là ont une drôle de manière d’admirer les choses. Tout à coup un drapeau vert, signe de détresse, nous arrête et nous passons au pas un viaduc qu’on reconstruit suspendu au-dessus d’un précipice de 1500 m de profondeur, enfin on arrive à Pistoie après avoir éprouvé toutes les émotions d’une course à la vapeur sur une corniche suspendue au fleuve des montagnes, traversant des torrents et des précipices.

Nous voici de nouveau dans la plaine dans la Toscane cette fois roulant au milieu des champs si petits de l’Etrurie couverts de vignes de maïs de sorgho l’olivier et l’oranger ne font encore pas leur apparition. A 6 h nous arrivons à Florence légèrement moulus mais mon admiration est si grande mes sensations si vives que tout passe dans mes yeux et je sens peu la fatigue. Un arrêt de 2 h 30 nous permet de nous reposer de souper et j’en profite aussi pour mettre à la Poste une petite lettre au crayon que j’écris pour vous entre la poire et le fromage sur la table du somptueux buffet de Florence dans une gare des plus belles que j’aie jamais vues. Comme à Turin la salle à manger est couverte de fresques superbes du plus bel effet...

(bas de page - manque une ligne)

... d’aller par les salles d’attente, pour arriver avant tout le monde je choisis un bon vin et nous voici roulant sur Rome où après 12 h nous arrivons.Heureusement j’ai pu m’étendre presque toute la nuit et je suis peu moulu.

Nous pénétrons dans Rome par la porte illustrée par les exploits des Garibaldi qui ont laissé sur les murs et maisons voisines les traces de leurs boulets nous passons de nombreuses ruines et nous arrivons à la fin à la gare qui est encore en construction. Un omnibus me conduit à la Minerve à travers les rues poudreuses de la vieille Rome.


vendredi 4 août 1872                Rome

Après avoir passé un temps considérable à essayer de me débarbouiller je cours visiter l’église de la Minerve sur la place où se trouve l’hôtel et je reste les bras ballants devant la beauté la richesse la couleur les marbres les bronzes les dorures les fresques tout cela si harmonisé qu’il est difficile de juger des détails au premier coup d’œil. Après la Minerve passé au Panthéon qui est là tout près ; autre épatement là peu d’ornements mais une vaste et écrasante coupole ouverte d’un grand trou rond la seule fenêtre de l’endroit tout autour des ?????? un pavé formé d’immenses plaques de marbre ou de porphyre rondes ou ??? ???? ???

Il est bientôt midi je prends un cab et cours à mes affaires. Mais pour le moment je cours me coucher à demain le reste un gros baiser. A propos la chandelle de M. Bapte ? est encore dans mon sac mais mon rhume est resté à Maure ?


samedi 5 août 1872                 Rome

J’ai reçu votre bonne lettre du 1er et je pars dans ½ h pour Brindisi où je serai demain soir qu’il me suffise de vous dire que j’ai vu aujourd’hui le Saint-Père Pie IX qu’il m’a béni deux fois ainsi que ma famille jusqu’au 3e degré comptés ? canoniquement et fait signer à sa secrétaire une supplique qui m’accorde ainsi qu’à ma famille et alliés jusqu’au ????? l’indulgence plénière in articulo mortis.


7 août 1872                  En mer à bord du "Malta", doublant la pointe de Torrente

Ma petite mère,
Je reprends mon journal interrompu le 4 au matin. En revenant de ma course aux monuments susnommés je prends un cab et me fais conduire chez le cardinal Picho, de là chez M. Guillemin qui demeure avec Mgr Verolles, évêque de la Mandchourie ; il me présente et je fais avec les deux évêques chinois un simple mais cordial déjeuner dans des assiettes anglaises bleues à chinois.

Mgr Verolles très gai me raconte un tas d’histoires, nous chante la chanson normande « j’ai vu le ciel de l’Holde ? ». Dès en sortant je cours visiter Saint-Pierre, le Colisée où je grimpe sur les gradins en ruines. Je ne pourrais vous dire l’impression profonde que l’on éprouve au pied de la croix de bois plantée au milieu de l’arête. Je cueille deux ou trois fleurs ou feuilles sur ces ruines sacrées et reviens par le forum, la colonne Trajan, etc. Le soir, je me couche moulu.


5 août 1872

Après avoir été voir un jésuite français et m’être confessé hier soir à l’église de Gesa ?, qui est d’une beauté et d’une richesse merveilleuse, je vais ce matin communier de la main de Mgr Guillemin dans la petite chapelle de sa maison. Je déjeune encore avec les deux évêques et repars pour le Vatican où j’obtiens une audience du Saint-Père pour 11 h 30. Je reviens ventre à terre à la Minerve. Je loue un habit noir à l’un des garçons et repars le cœur palpitant pour le Vatican après avoir montré aux Suisses du Pape (habillés tels qu’ils étaient lorsque Michel-Ange dessina leur uniforme) ma lettre d’audience, je suis introduit dans l’intérieur du palais tout resplendissant de marbres de mosaïques ????? ; et les camériers prennent ma lettre et me font placer. Deux jeunes officiers de zouaves montent la garde à la porte. Enfin le Saint-Père paraît il marche droit et sans hésiter malgré ses 80 ans, il paraît se très bien porter, je lui baise la main et le pied, et lui remets la lettre du curé Bernard et une demande d’indulgence plénière pour moi et les miens, que j’avais préparée d’avance. Il nous bénit tous « les cœurs, les corps et les familles » et il continue sa route entrant dans une salle où sont réunis une centaine de personnes qui, plus favorisées, ont quelques instants de plus à voir le Saint-Père.

Ne pouvant entrer, je me tiens à la porte et reçois une deuxième fois la bénédiction papale, puis une troisième fois au moment où il en sort pour aller se promener dans les jardins du palais. Je parle quelques instants à un camérier qui se trouve ????? et me plaint de n’avoir pas eu le temps de faire toutes les démarches pour obtenir une audience particulière pour nous consoler il me fait obtenir du Saint-Père, je cours me déshabiller et reviens au Vatican reprendre ma supplique signée, ainsi que le Saint-Père avait bien voulu me la promettre.

En sortant du Vatican, je rentre à Saint-Pierre et fais l’ascension du dôme me coulant jusque dans la boule de bronze qui supporte la croix, je n’y peux rester que quelques instants vu la chaleur épouvantable qu’il faisait dans ce chaudron. Je demande à monter par-dehors à la croix mais cela est défendu comme trop dangereux. Je redemande à visiter la fabrique de mosaïques où l’on met 7 jours à faire la moitié d’un tableau de fleurs flamand en petits morceaux de verres colorés dont il existe 2700 échantillons divers dans les caves du « munizione » : j’ai vu là des tableaux de Raphaël reproduits en mosaïque polie, c’est admirable, impossible de dire que ce n’est pas peint à l’huile et ????? lumineuse ? le tableau est toujours verni étant poli à la meule et les couleurs ne s’altèrent jamais.

Je visite ensuite le musée du Vatican puis me fais conduire en dehors de Roma sur la voie Appienne, aux Catacombes de St Callixte, un des plus grands cimetières souterrains de Rome où il fut, dit-on, enterrés 14 papes et 170000 chrétiens. Que vous dire, l’impression de recueillement que l’on éprouve sous ces voûtes sombres, dans ces galeries étroites toutes tapissées de tombes ne peut se rendre ??? ligne coupée .. d’un pape martyr admire le tombeau et le portrait de Ste Cécile enfin après avoir été faire un dernier adieu aux deux évêques ?????

Je repars avec leurs bénédictions et prends le soir le train pour Brindisi où j’arrivai hier soir rompu de fatigue après 24 h de voyage dans cette affreuse boîte qu’on appelle un wagon. J’arrive le 1er à bord du Malta où je me jette sur ma couchette à 10 h 30.


Lundi 7 août 1872

A 5 h je suis réveillé d’un songe où je vous ai vue communiant pour moi avec Emmanuel pour le ????? des meubles (la porte) qu’on embarque, l’embarquement des sacs de lettres ????? 9 heures enfin le Malta fait tourner son tournebroche et nous voici à l’heure qu’il est (11 h 30) bientôt hors de vue des ????? côtes italiennes courant vers l’Egypte à toute vapeur.

La mer est comme de l’huile fût-elle grosse je suis content de même car j’avais hâte d’arriver au bateau rien ne me dégoûte comme ces affreux chemins de fer où l’on est couvert de noir et de fumée encore grâce à ma promptitude dénonçant ces lambins d’Italiens j’ai toujours réussi à avoir mon côté ? mais me voici au bas de ma page, à bientôt. La ????? de mon journal nous filons sans bouger dans les flots bleus de la Méditerranée. J’oublie de vous dire qu’on m’a remis ce matin à bord votre lettre consternante ? la copie de celle où comte ?


Mardi 8 août 1872                En  mer par le travers de la marée.

Il fait beau et la chaleur augmente très sensiblement depuis que nous descendons vers le sud avec une vitesse toujours la même que le ????? lancé quatre ou cinq fois par jour on apprend être de 11,5 noeuds. Tous les soirs on tord le cou à quelques-uns des nombreux canards parqués sur le pont, le boucher a même exécuté deux moutons hier soir car nous sommes nombreux.

Tout est tellement plein que l’on est obligé de diviser les passagers ????? bordée pour le déjeuner et le dîner ; du reste on peut attendre sans trop mourir de faim (bien que la mer aiguise singulièrement l’appétit) car on ne fait pas moins de cinq ou six repas par jour. A 6 h le stewart vient vous réveiller avec une bonne tasse de thé ou de café et un peu de biscuit de mer on se lève pour aller déjeuner à 8 h 30 ou 9 h 30 avec la seconde bordée car ceux qui ont embarqué à Brindisi sont incorporés dans la seconde bordée. Le déjeuner est substantiel à midi quand les sous-officiers ont fait le point la cloche appelle tout le monde au lunch. A 5 h 30 ? souper à 5 h thé et on court se rafraîchir sur le pont à la bise du soir.

Quand à des faits, rien depuis que votre bonne lettre est venue me surprendre à Brindisi ; sinon que j’ai été singulièrement ému en voyant à côté d’un Français qui dormait sur le pont le livre de Ludovic "Australie" ; j’empoignais le livre et écrivis au crayon sur la couverture « A. Fauvel fils du capitaine Fauvel à bord du Malta ».
Le monsieur l’a t-il vu (Bas de page - manque une ligne)... temps de le savoir car je lui ai entendu dire qu’il va en Australie.

J’espère qu’à Alexandrie notre cargaison d’Italiens et d’Anglais s’allègera un peu et on nous promet déjà des cabines plus confortables à bord de la grande malle que nous trouverons à Suez. Ce n’est pas que je désire changer car, bien que nous soyons 4 dans ma cabine ce sont les anglais qui sont mes compagnons de route et cela va bien.

La mer est très calme et d’un beau bleu ; bien qu’il y ait peu de distractions la vie du bord me plaît, pourvu toutefois que le mal de mer ne vienne pas me faire changer d’avis. Ici on peut faire sa promenade d'avant se coucher et en fin de compte je travaille j’apprends par cœur ma géographie de la France. Quand je la saurai je ne suis pas embarrassé quoi faire quant à la solitude.

Je vous dirais que jusqu’ici, malgré mes craintes, c’est vous que je plains le plus, j’étais né pour cette vie-ci, j’adore la mer malgré tout : point de visites, point d’embêtements ; je ne me presse point de faire des connaissances. Elles viendront assez vite et puis je me sens si consolé depuis que j’ai fait mon sacrifice. J’ai tout donné à Dieu, il ne peut m’abandonner, ainsi ayez confiance, vous voyez comme le voyage commence bien sur les flots bleus de la Méditerranée mais il fait chaud en diable et je cours prendre mon bain de mer...
(bas de page - manque une ligne)

... passera sur la Méditerranée sans s’y baigner, seulement au lieu de descendre se plonger dans l’eau, la machine se charge de nous amener l’eau de dessous la grille dans l’entrepont, où l’on se plonge dans la baignoire ; on peut même si l’on veut tourner un robinet et l’on reçoit une douche agréable sur la tête. D’après ce que j’ai vu dans les journaux, il paraît que vous avez eu joli temps dans la Manche, pendant mon voyage par terre et que des bateaux sont venus à la côte. A propos de cela, faites aussi une sorte de journal ; notez les plus petits faits et tenez-moi au courant de tout ce qui se passe, vous ne m’en enverrez jamais trop.


Mercredi 9 août 1872                   En pleine mer rien en vue.

Nous écumons toujours les flots si bleus de la Méditerranée ; je ne me lasse de les admirer comme le ciel de l’Italie, ils inspirent la poésie. Vers 11 h la bise s’est levée nous avons salué au passage la malle anglaise allant d’Alexandrie à Brindisi puis le pont est devenu peu à peu désert car la mer grossit on met de la toile et bon nombre de passagers et de nombreuses dames dégringolent cacher dans leurs cabines leurs faces pâles et leurs grimaces involontaires mais ne rions pas trop si je tiens bien aujourd’hui, qui sait quelles grimaces je ferai moi-même au premier gros temps que nous attraperons. Enfin pour le moment tout va pour...
(Bas de page – manque une ligne!

... heureux que je puis désirer de l’être loin de vous. Le beau ciel cette lumière admirable qui vous pénètre, ce pont qu’on lave chaque matin et sur lequel on mangerait la soupe. A l’ombre sous la tente assis par terre pour mieux conserver mon équilibre, je viens de lire quelques pages de Tackeray avec un vrai plaisir. On vient de faire passer les listes pour le train égyptien qui doit nous emmener demain.

Chaque compartiment doit contenir 6 personnes on vous présente une liste des voitures et vous pouvez ainsi choisir vos compagnons de voyage. Je me trouve avec un Mr Fleming et sa fille, deux jeunes Ecossais qui vont dans l’Inde dont j’ai un peu fait la connaissance. En fait d’incidents à notre ????? aujourd'hui je ne vois que le suivant nous nous sommes arrêtés ce matin en pleine Méditerranée pour remplacer les étoupes des pistons qui laissaient échapper la vapeur en trop grande quantité, cela a duré près d’une heure car il y avait quatre cylindres nécessitant l’opération.

Nous filons toujours par 11,5 nœuds vers Alexandrie où nous arriverons demain matin. J’ajouterai quelques mots à ma lettre et la jetterai à la boîte pour vous. En attendant, je vous embrasse bien fort tous.


Samedi 12 août 1872               Suez, à bord du Sumatra (400 chevaux, 4000 tonneaux, 16 nœuds à l’heure, à hélice)

Chère petite mère,
J’ai donc enfin un moment de repos mais depuis trois jours tant de choses m’ont passé sous les yeux que je ne sais par où commencer d’autant plus que j’ai peine à me rappeler où j’ai laissé mon journal. Heureusement que mon carnet de notes est là sous mes yeux et que plutôt que de manquer quelques lignes je reprendrai de plus haut.

Mercredi soir, nous arrivions en vue d’Alexandrie où nous entrions le lendemain matin. Vue de loin la terre d’Egypte paraît basse et enveloppée dans une espèce de brume de chaleur on voit peu à peu poindre les phares et ceux qui savent où la pêcher aperçoivent même la fameuse colonne de Pompée, pour moi bornant ma vue à ses limites restreintes je me contente d’admirer la rapidité avec laquelle arrive sur nous la barque blanche et verte du pilote avec sa grande voile triangulaire, ses marins en ????? fez, turbans, chemises bleues, blanches, etc. et les grands pantalons. Le peuple est immuable comme le Chinois on a beau lui apporter chemins de fer, bateaux à vapeur et gaz, il garde toujours le costume et les habitudes des mille et une nuits.

La rade est d’un accès fort dangereux un fond de roche très « shallow » laisse voir les bancs à un pied ou deux sous notre quille et de nuit aucune navire ne peut entrer ni sortir avec ou sans pilote. Je jubile de voir cette mer ce ciel en couleurs la lumière qui inonde tout de ses rayons un peu chauds. Nous comptons les 23 moulins à vent qui tournent sur le quai et doublons la nouvelle jetée qui va agrandir la rade où nous pouvons voir des forêts de mâts de magnifiques navires de guerre turcs plusieurs transatlantiques de la Compagnie P & O .

Je cherche en vain des yeux nos trois couleurs elles finissent par m’apparaître à la corne ? de deux navires seulement un petit aviro ? et un charbonnier algérien – et cela aux portes de notre pays. Les bateliers viennent à toutes rames nous offrir ????? canots à tentes bariolés de toutes couleurs avec un beau poisson bleu ou vert peint à l’avant. Je ne me presse pas de me faire voler c’est alors que tous les Français étant partis je me trouve nez à nez avec le propriétaire du livre de Ludovic M. Houdville qui va à Sidney sans savoir un mot d’Anglais je le tire d’affaire et lui raconte ? après lui avoir dit mon nom l’histoire du bouquin qui l’avait fort intrigué.

Nous descendons à terre les derniers dans un petit canot dont le drogman parle six ou sept langues à choisir. Nous apprenons en arrivant que le "Massilia" a gobé un bon coup de vent dans la Manche a dû relâcher à Portland avec une pale de ses aubes cassée et après avoir failli perdre son capitaine qui voulant vérifier l’accident était tombé par une trappe ouverte et n’a dû la vie qu’à une barre ????? qu’il a accrochée dans sa chute. Grâce à cela le Massilia ne sera ici que de ce soir en retour de deux jours.

En arrivant à terre nous passons à la douane où il faut exhiber ses passeports je leur baragouine mon anglais ne montre rien et nous passons mais nous avons à nous battre pour nous tirer de la foule de porteurs guides interprètes qui ????? ????? ; nous distribuons force coups de canne, nous laissons par crainte d’être volés ????? un drogman qui nous vole bien mieux que les autres. Nous prenons une voiture et allons déjeuner à l’hôtel Abbat.

Après le déjeuner course à la colonne de Pompée située sur un tertre au milieu des tombeaux blanchis des arabes autour des sphinx et des dieux de granit (granite ?) gisent sur le terrain au milieu de la poussière et des bouses de vache et de chameaux qui sèchent au soleil. Alentour quelques huttes infâmes de fellahs construites en boue et en pierres blanches. La colonne est superbe c’est un énorme fût en granit (granite ?) rose poli et monolithe supportant un chapiteau également monolithe et reposant sur un piédestal monstre formé seulement de deux pierres.

Nous traversons la promenade bordée de tamarins arbres et de ????? à droite et à gauche des murs en ravis laissent passer par leurs fentes les grandes plaques opaques et poussiéreuses des nopals. En dedans de magnifiques palmiers-dattiers portent d’énormes régimes de dattes variant du jaune au noir en passant par l’orange et le rouge, malheureusement leurs magnifiques palmes déjà grises naturellement sont blanches de poussière.

Nous poussons jusqu’au Nil ou canal dans lequel les noirs bœufs égyptiens à longues oreilles et à cornes croissants inversés en arrière sont plongés jusqu’au dos, à côté des petits bédouins non moins noirs prennent leurs ébats dans l’eau limoneuse à l’ombre de tamarins et des lauriers rose en fleurs. Des tulipiers et des figuiers d’orient bordent le chemin et des quantités de lézards gris prennent la fuite et grimpent aux acacias avec une célérité dont je ne les aurais jamais cru capables.

Après avoir suffisamment admiré l’eau les bateaux verts et roses décorés de noms en toutes langues nous rentrons en ville après avoir craché sur les barques nubiennes dont les bordages semblent faits de boue nous rentrons en ville quittons la voiture et parcourons à pied le bazar arabe où l’on voit chaque marchand accroupi sur sa natte à l’entrée d’une grande boîte carrée où sont entassées ses marchandises il n’y a ni portes ni fenêtres l’homme fait la devanture les deux côtés et le fond sont les étagères et cela grand comme un quart de ma chambre à Cherbourg.

J’achète là pour un shelling un turban blanc pour mon chapeau qu’on m’avait fait acheter dans une boutique européenne enfin fatigués nous rentrons à bord pour voir arriver de loin le "Massilia" mais crac le canon annonce le coucher se soleil et le pauvre navire manquant d’une heure l’entrée du port est obligé de passer la nuit dehors. Nous passons une bonne nuit à bord.


Vendredi 11 août 1872

Le lendemain matin la malle entre bien mais nous ne pourrons partir que ce soir pour Suez nous rentrons à pied en ville prenons deux ânes et alors j’aurais voulu que vous me voyiez galopant infatigable sur les infatigables petits ânes du Caire, d’Alexandrie veux-je dire, mon âne s’agenouille pour commencer heureusement je ne lui passe pas par-dessus la tête et alors il n’a plus trébucher que deux fois dans toute la journée nous avons galopé 9 h visité ainsi l’aiguille de Cléopâtre les bords du Nil l’aride campagne égyptienne et nous somme rentrés à bord partis hier soir pour Suez où nous sommes arrivés ce matin. Je ferme ma lettre pour qu’elle parte ce soir : nous partons demain matin pour Aden. PS : je vais bien me porte bien la lumière chaleur couleur ????? me mettent en bonne humeur je suis aussi heureux que possible sans vous.


Mercredi 16 août 1872                  En mer rouge

Chère petite mère,
Je vais profiter de quelques instants libres pour vous faire revenir avec moi un peu en arrière et vous parler encore un peu de ma visite à Alexandrie. Je vous vois d’ici sourire à ces mots de moments libres, c’est qu’à vrai dire, notre vie est bien occupée ici, ne serait-ce qu’à manger. On mange, on fait son mille ou deux sur le pont après chaque repas pour faire la digestion on fait quelques fois la sieste de 1 h 30 à ????? quand il fait trop chaud, enfin on joue une ou deux parties ?????, on re-mange, on monte danser, on va voir la comédie et on va se coucher.

Alexandrie :

Quand après avoir réussi à choisir un bateau avec son vigoureux rameur à tête bronzée et à pantalon bouffant, on a mis le pied ????? turc, on est immédiatement conduit à la Capitainerie du port, construction blanche fermée par des grilles en bois et décorée de croissants et étoiles de bois destinés à recevoir des lampions pour les différentes fêtes lampionnées. Là on vous demande vos passeports.

Si vous savez un mot d’anglais, vous le leur baragouinez lentement, ils vous croient sujets du peuple libre et vous passez incognito en donnant au portier une carte qu’on vous a remise à cet effet.

Vous voilà lancé dans la rue, enfoncé dans la poussière jusqu’aux chevilles, entouré de drogmans, marchands, porteurs, âniers, cabbys, etc. L’un cherche à vous persuader que tous ses concitoyens sont des voleurs et il se propose pour vous conduire et garder vos poches. Ignorants des mœurs et coutumes du pays nous préférons nous faire égorger par le drogman fier de ses six langues et de son vêtement de soie verte, il grimpe, son rotin en mains, sur le siège de la voiture et se charge, moyennant 6 shellings par jour, de nous faire visiter toutes les curiosités de la ville.

En montant en voiture, nous échappons aux poursuites des âniers porteurs et nous passons au milieu des dattiers nopals et traversons le cimetière musulman ; il s’étend sur le versant d’une colline et couvre un immense espace de terrain de ses tombeaux construits de pierre calcaires ou de briques cuites au soleil mais invariablement blanches à la tête et au pied deux étoiles s’élèvent sur le berceau et portent une inscription en bleu ou rouge peinte ou émaillée, à l’une des extrémités se trouve presque toujours une plante d’aloès tellement couverte de poussière qu’on croirait qu’elle sort d’une fontaine pétrifiante.

Au haut de cette colline s’élève sur un sol poudreux et couvert de débris la fameuse colonne dite de Pompée. Elle est de granit(e ?) rose poli à 98 pieds de haut et 29,5 de tour à la base. Bien qu’isolée aujourd’hui, elle était il y a quelques siècles entourée de ses sœurs et formait avec elles le fameux portique où étudia Aristote et qui faisait probablement partie de la fameuse bibliothèque d’Alexandrie. On a du reste trouvé sur une des pierres du piédestal le nom de Psammetichus en qui la fenêtre remonte bien haut avant J-C.

Le premier maître-mécanicien du bord m’a raconté que des Anglais sont allés boire du punch sur son chapiteau. Un cerf-volant aurait été le moyen employé pour faire passer une corde par-dessous. Bien qu’ayant déjà lu cette histoire quelque part, je vous la donne comme je l’ai reçue libre d’en faire croyance ou non.

Nous revenons en passant au milieu des sphinx et rois de pierre gisant sur terrain et lâchons notre voiture. Nous nous acheminons à pied à travers les rues. Dans les boutiques européennes on nous fait tout un prix fou aussi je n’y achète rien, me réservant pour un temps moins cher. Nous quittons la ville européenne ornée d’une grande place dite des consuls.

Cette place est ornée de deux fontaines d’arbres et d’une statue égyptienne encore voilée, que je soupçonne être celle du pacha dernièrement exposé aux Champs Elysées. Autour le consulat français sa porte des ????? des passages portant des noms de tous pays ; je remarque passage Mapin ? ; passage Bismarck. Les maisons européennes sont superbes ornées de grilles en fer ouvragé à la mode italienne elles sont éclairées au gaz ainsi que les rues je remarque que les réverbères sortant de la maison Bail ? sont exactement ceux de Paris.

Le soir nous rentrons à bord légèrement fatigués mais ayant déjà appris que le prix des barques était 1 franc par personne et non 2 francs. Nous voyons le Massilia qui ne peut entrer ce qui nous permettra de passer encore un jour à terre.


Jeudi 11 août 1872

Le lendemain nous revenons donc à terre cette fois décidés à explorer la ville de nous-mêmes nous envoyons promener le drogman et nous nous trouvons aux prises avec les ânes et leurs maîtres.

De toute part accourent les âniers louangeant leurs ânes dépréciant ceux de leurs voisins dans toutes les langues possibles. « Moi Mohammed mon bourricot un bon bourricot Assan ». « His bourricot pas bon, moi good boy ! Yes good boy, ride master, ride my donkey, a good donkey, son donkey pas bon ». Alors vous regardez ces figures arabes égyptiens grimaçantes rieuses qui montrent leurs belles dents blanches et rient toujours, ce sont du reste les seuls qui rient et fassent de bons mots. Le reste de la population est grave sévère dédaigne de vous regarder et semble mépriser profondément le « roumi ».

Quant aux bêtes, elles sont petites alertes le poil rasé elles sont fraîches gaillardes et trottent toujours malgré le poids de leur énorme selle à haut et rond pommeau et le poids du particulier superajouté. La crinière est coupée en brosse avec une petite houppe sur la tête. Souvent leurs jambes sont décorées d’une espèce de talonnage qui fait qu’on leur dirait des chaussettes. Alertés par les cris des âniers et voulant nous en dépêtrer nous déchargeons à droite et à gauche des coups de parapluie les rieurs se sauvent derrière la croupe de leurs ânes qu’ils poussent en avant et sur la tête desquels tombent les coups destinés à leurs maîtres.

Nous visitons à pied le bazar arabe. Des deux côtés d’une rue poudreuse et défoncée où se montre parfois l‘égout dont la voûte est éventrée, se trouvent des rangées de boutiques. Mais au-dessus du sol de quelques pieds sont tout simplement une chambre sans porte ni fenêtre et sans arrière-boutique elles se ferment pendant la nuit par les portes rabattues sur le mur pendant le jour et couvertes d’écritures arabes ????? quant la nature des ????? vendues par le propriétaire qui se tient accroupi sur le devant de sa boutique fumant sa longue pipe ou le « narguileh » abrité du soleil par un auvent en toile souvent décoré de couleurs. Devant lui sur le sol de la rue une table ou deux chargée de marchandises et une grande amphore de terre à fond cônique à moitié enfouie dans la poussière à moitié supportée par un cadre de bois à pieds destiné à contenir de l’eau ou de l’huile ; au-dessus de la boutique se balance une lanterne à bougie de forme byzantine.

Autrefois toute la ville ne possédait que ce genre d’éclairage. Comme chez nous au moyen-âge, tout est divisé par corps de métiers et les marchands de fruits ont leur bazar à part, les tailleurs de même et ainsi de suite. Ce qu’il y a d’assommant c’est que c’est extrêmement divisé ; voulez-vous un fez ou une coiffure arabe complète il vous faut d’abord aller à la boutique où vous trouvez le fez tout nu puis à celle où on vous le repasse d’un seul coup en l’introduisant dans un moule chauffé formé de deux parties, le billot et le fer.

Le billot est chauffé par-dessous et l’on fait tourner le fer sur le fez introduit sur le billot. Il vous faut alors aller à une troisième boutique où l’on ne fabrique que le gland de soie destiné à achever le fez enfin une quatrième boutique vous fournira le turban de coton blanc qui doit achever la coiffure. Souvent au milieu de ces boutiques de cette foule pressée et silencieuse passent tout-à-coup une longue file de chameaux balançant sur leur dos d’énormes paquets ????? ma cargaison de pierres mal ficelées Le flot se reforme derrière le sillage de ces navires du désert qui ont une démarche bien balancée et majestueuse leur oeil doux et indolent ne bouge pas pour vous regarder et semble vous inonder d'un flot de mépris.

Puis voici un coureur arabe qui armé de sa longue canne ornée fait faire place pour la voiture de quelque grand bey ou pacha vous devez vous garer dans les boutiques, car la rue n'est pas large et s'il arrive quelque accident vous ne pouvez jamais obtenir justice. Après la voiture du seigneur viennent de longues voitures plates et basses sur lesquelles sont accroupies sur deux rangs une vingtaine de femmes arabes avec leur visage voilé ce sont probablement les omnibus du pays ; quant aux hommes ils vont toujours à pied ou à âne avec ????? coureur qui tape toujours sur la croupe du baudet.

Ayant assez vu de la ville nous nous décidons à monter un bourriquet et à aller voir la campagne. Je ne suis pas plutôt perché sur le mien qu'il s'agenouille subitement avec l'intention évidente de me mettre sur le pavé je tiens bon et me plains en grimaçant demon qui court derrière moi. « Ah good donkey, me dit-il, lui jamais tombé si lui tombe encore un coup de bâton sur tête et moi tuer lui » je ris et repars au galop mon ????? enturbanné sur la tête avec un voile flottant par derrière et mon parapluie sous le bras.

Je pensai alors à Emmanuel et aurais bien voulu l'avoir à mes côtés au lieu du Français Houdaille mon compagnon de cabine. Je devais être terriblement comique voyez-vous d'ici mon grand corps sur ce bidet noir. Il fait chaud mais j'en souffre bien moins que de la poussière effrayante qui nous aborde au sortir de la ville. Nous avons la chance de voir de loin deux superbes trombes de poussière tournoyant sur le désert.

Nous examinons de près un obélisque de granit(e?) rose perché au bord de la mer dont l'on a mangé une des faces avec son arête. Connue sous le nom d'aiguille de Cléopâtre cet obélisque a été apporté là de l'Egypte centrale en compagnie d'un autre qui gît maintenant à côté de lui mais ????? sous le sable, je n'ai pas besoin de dire que bien antérieur au règne de cette princesse il n'a rien eu à ????? avec sa table à ouvrage.

Nous galopons sur une route poudreuse et nous ????? courent après les nombreux lézards gris qui se chauffent au soleil ; les lézards déguerpissent avec grande rapidité et grimpent sur les arbres où ils se cachent. Je réussis cependant à m'en procurer deux auxquels nos guides ont cassé la tête d'un coup de baguette. Après avoir visité les jardins du vice-roi ouverts au public depuis quelques années nous revenons en longeant le canal Mamouddiah qui rejoint le Nil à Alexandrie sur la gauche grincent les sakkia machines à élever l'eau pour l'arrosage des champs dont vous trouvez le dessin et la description dans le magasin pittoresque.

Le soir nous rentrons à bord refermer nos caisses et à 5 h un petit bateau à vapeur vient nous prendre nous poussons un triple hourra d'adieu au capitaine et officiers du Malta au moment où nous démarrons pour aller prendre les passagers du Massilia enfin entré en rade ce matin. Chargés d'un tas de bagages et de près de 200 passagers de 1re classe, nous allons tous débarquer au chemin de fer qui doit nous emmener à Say.

A 7 h la cloche donne le signal chacun se débrouille de trouver son nom «écrit à ????? sur la vitre du wagon qu'il doit occuper? Nous sommes six par six dans des compartiments de huit et en route. A Badnah, station du Caire on nous fait descendre tout notre wagon dont un des ressorts vient de ????? et que la roue menaçait de défoncer, pendant le changement de voiture j'étudie les chiffres égyptiens qui marquent nos voitures et je vous transmets ci-contre la numérotation égyptienne.

Nous arrivons enfin à Say après une mauvaise nuit à 5 h du matin ; là nous trouvons des journaux anglais des lettres adressées poste restante de misérables petits bédouins nous poursuivent en criant « backchifh ciad », « donnez-moi quelque chose ». J'aurais eu grand plaisir à les coiffer de mon chapeau noir mais je l'avais donné au steward du Malta.


11 août 1872                   Suez

Nous avons à passer la journée ici je me promène sur la jetée semi-circulaire qui rejoint les docks à la ville mais fatigué par ma mauvaise nuit ????? je n'ai pas le courage d'aller jusqu'en ville si on peut appeler cet amas de baraques après avoir ramassé deux ou trois jolies coquilles je reviens déjeuner à bord. L'après-midi en bon Français je vais une visite à l'entrée du Canal mais je n'aurai pas la chance de voir entrer ou sortir aucun navire. Toute la nuit grincent les grues à vapeur qui embarquent les ????? 

À propos de malle, en rentrant à bord à midi, j’avais le plaisir de voir ma grosse malle, montant sur les épaules robustes d’un noir, le plan incliné qu’il l’amenait à bord, je pince au passage ma malle de cuir et la fait mettre dans ma cabine, mais il me faut courir à la recherche de ma valise brune, momentanément égaré. Enfin grâce à mon numéro sa grande étiquette verte marqué Shanghai et la blanche marqué « babin », j’ai réussi à remettre la main dessus. Nous sommes moins foulé à bord du Sumatra abord du Malta.

C’est que tous les nombreux passagers pour Bombay et Calcutta viennent de s’engouffrer à bord du Sonate qui part ce soir vers xxx je vais me coucher dans ma cabine où nous sommes trois, je possède la xxx d’en bas étant ainsi la mieux partagée. Nous partons de Suez à 5h du matin. Filons nos 9,5 km.


Dimanche 13 aout 72

La cloche sonne un ton d’église. Les participants se rassemblent à 9h dans le grand salon. je les xxx, moi après avoir pris mon bain de mer, je lis ma messe. le soir ils ont encore un sermon. Nous passons en vue du Sinaï.

lundi 14 août 

Sortie dans la mer Rouge. Toujours un temps superbe. Vers le soir, nous passons en vue d’un petit îlot de corail, appeler d’Deadless Shore, un récif à pic de la mer qui a 100 xxx de profondeur tout autour.

Les Anglais ils élevé un phare et ne pouvant se confier aux gardiens égyptiens et arabes, accoutumés à dormir dès le soleil couché, ils y ont envoyé des gardiens. Je viens de voir à bord, un échantillon du sable, recueilli sur cet îlot. Comme celui des plages de plusieurs îles vu depuis il est rose tout entièrement formé,des débris de coraux rouge et blanc ; on prétend que le nom de Mer Rouge vient de la couleur de ces sables.

Le soir du 14, nous coupons le tropique et entrons par suite dans la zone tropicale, on ne tarde pas à s’en apercevoir car la chaleur augmente rapidement. Je couche encore dans mon lit, xxx avec porte à sabord ouvert comme toujours.


Mardi 15 août

Quelques poissons volants sont apparus dans la journée. Le soir on danse sur le pont car nous avons à bord une vingtaine de dames. Après le bal au moment du couvre-feu 10h30, on signale le Surat ne filant que 6 noeus et nous 8 1/2. Nous devons nécessairement le passer demain.

J’ai avant d’aller me coucher, une longue discussion religieuse avec mon compagnon de cabine, Monsieur Houdaille, je pose catégoriquement mes principes, combat, les théories de Darwin qui l’a séduit, et l’a conduit au matérialisme. Je l’amène lui-même à condamner un en partie sa propre théorie, puis vais me coucher fier d’avoir ainsi conquis ma liberté religieuse.

D’un autre côté j’avais eu la veille une petite explication de ma croyance et de mes principes avec Monsieur xxx , un écossais charmant et aimable squatter en Australie où il retourne et de mon compagnon de cabine compris approuvé et j’ose dire admiré ? xxx, je fais tranquillement mes prières matin et soir sans avoir aucune envie à supporter de la part de mes deux de la part de mes 2 compagnons.

J’avoue que je craignais encore plus l’irreligieux matérialiste français que le protestant écossais. Mais maintenant la chose est réglée, la glace rompu notre intimité forcée comme habitants de la même cabine m’est devenu agréable.


Mercredi 16 août 72

Il fait moins chaud ce matin mais dans l’après-midi cela chauffe dur. Nous passons le Surat vers une heure. Le soir je défais mes malles, amène à la surface mes vêtements blancs et légers. xxx la veste de toile grise, le gilet blanc et le pantalon de toile blanche, puis je trouve Avec le plus grand plaisir, la marinière que je n’avais point inscrite et que je craignais d’avoir oublié. Je la passe avec ma chemise de nuit et me jette sur mon lit car il est impossible de garder un drap, la sueur coule sur mon oreiller, mais je tiens bon.

Monsieur Houdeville à beau m’inviter à aller coucher sur le pont où il fait bon, je prétend qu’il ne fait pas plus chaud qu’à Paris et je reste avec Monsieur xxx, qui trouve que pour un français je sais assez bien me débrouiller en voyage.

Ma grosse éponge de bain pendue à son clou au-dessus de ma cuvette lui ai tapé dans l’œil, il est heureux de me voir prendre ainsi les coutumes Anglais. Je déniche un vieux mouchoir percé et, au moyen d’une aiguille et de fil, je le transforme en une poche contenant cinq pochettes. Je le suspend à côté de l’éponge et y fourrexxx mes brosses mes brosses, peigne etc. il me sert comme une véritable table de toilette.

Jeudi 17 août 72 

Nous passerons devant Djebel xxx, montagne, montagne xxx île volcanique qui a encore été en action pendant les 20 dernières années. Chaleur forte, sabord fermé à cause de la grosse mer. 10 xxx de mal de mer après avoir vomi 3 ou 4 fois je me remets sur mes pieds et reviens achever courageusement mon xxx interrompu.

Nous recevons un peu d’eau sur le pont de temps en temps mais je tiens bon, et je vais me coucher dans ma cabine en chemise et pantalon blanc sur mon lit.


Vendredi 18 août 72

Nous passons ce matin successivement devant les 12 îles appelées les 12 apôtres, elles sont petites faites d’une roche grise sur laquelle on voit des masses de lave rouge, brin foncé. Pas une herbe mais des oiseaux ; nous apercevons en pêche au-dessus de l’eau, des milieux d’oiseaux blanc, puis des espèces de grands canards qui gris à bec plat, les poissons volants fourmillent de toute part, ils ont l’air blanc vu du bord.

Nous passons xxx et vers midi entrons dans la mer rouge. je me mets à vous à vous écrire à 8h et me voici encore écrivant à la table du carré, rafraîchit par un grand punhah, sorte de grandes planches, couverte de blanc que fait aller et venir un nègre au moyen d’une ficelle. Je suis aussi heureux que possible à bord. le mal de mer ne m’a xxx que 10 minutes depuis xxx la traversée est régulière. Hhier soir, le vent soufflait debout, et nous rafraîchissait un peu ; à l’horizon se déchaine un orage, les éclaires illuminaient à droite et à gauche, les montagnes africaines de l’Arabiques.

Perché sur le gaillard d’avant, j’avalais la brise à pleins poumons, mais il est temps que je ferme cette lettre si je veux qu’elle parte tantôt d’Aden.

Ceci n’est qu’un journal, mais je compte vous donner dans ma prochaine lettre de long détails sur moi-même, car les détails deviendront réels et j’aurai tout le temps pour vous parler de moi. Si Emmanuel veut commencer à tracer ma route sur la carte je lui envoie les points faits chaque jour méridiens de Greenwich différent avec l’heure de Londres,

Date

Latitude nord

Longitude Est

Distance

13

28°59

32°31

62

14

25.17

35.35

271

15

21.46

37.51

248

16

18.19

39.59

240

17

15.04

42.07

230

18

12.30

44.3

209

Albert en bonne santé

Dimanche 20 août 72 :         Océan indien

C’est aujourd’hui dimanche et malheureusement aussi protestant ici qu’à Londres. Dimanche dernier bien qu’en mer rouge, on avait fait l’office du matin et celui du soir dans le grand salon ; mais les deux, Claire Grumman, probablement choqué de ce que les Catholiques et autres ne soient assis sur les dressoir du salon pour jouir du coup d’œil ont décidé aujourd’hui qu’il fallait faire évacuer le aux infidèles aussi et ils installent sur le pont avec leur congrégation, occupe comme points importants du l’escalier du salon.

Nous avons dû nous mettre soit dans nos cabines soit dans le petit salon, soit dans le gaillard d’avant. Après les services lunch et l’observance hypocrite du dimanche, commence les jeux de palets et ceux dessous sont retirés dessus, le pont, les échiquier caché, sauf un que je viens de découvrir en fur temps partout, dans tout le monde, forcé à l’inaction pique un somme dans sa cabine et moi ne sachant plus que faire, je profite de la de cela pour venir causer avec vous et vous dire quelques mots je sens à bout.

Je vous ai déjà présenté il me semble mes deux compagnons de cabine, Monsieur anneaux et Iville, je passe donc à ma propre personne à 5h30 six heures, c’est-à-dire au point du jour le steward in grammes, viens m’ouvrir les yeux, avec une tasse de thé, un biscuit, sitôt avaler, je me lève ou tôt, je saute par terre et en Morès et chemise de nuit, ma grosse éponge sous un bras ma serviette sous l’autre.

Je cours prendre un bain non non non mieux prendre mon tour à la porte deux l’une des salles de bain affectées aux premières classes. Lorsque je suis Pro, j’arrive souvent le premier le plus souvent j’attends 10 ou 20 minutes ce qui veut dire un ou deux tours car une affiche manuscrite invite les baigneurs à ne pas rester plus de 10 minutes dans la salle de bain.

Un aigre m’apporte une une bassine bouilloire, bouilloire d’eau douce, je tourne le robinet et la mer monte dans ma baignoire, non par un pronon par une Non par une pompe, mais par la propre impulsion du navire. Je me plonge alors cinq à huit minutes dans une superbe baignoire de marbre blanc, tu tires les bouchons et à mesure que l’eau descend, je me débarrasse de l’eau sale sur ma Sur en me couche d’eau, douce avec ma ma grande et ma grosse éponge. Cette précaution a pour but d’empêcher une excitation de la peau appeler Frilet Hetz engendrée par la et par le sel, se mélangeant aux sueurs.


Je rentre dans ma cabine achevé ma toilette, qui comprend quelques fois le lavage d’un faux col d’un mouchoir ou même d’une paire de manchettes non de chaussettes. Avec ce système, je n’ai qu’une paire ou deux et un mouchoir. Après la toilette prévu depuis prière après la toilette prière, puis on est à peine près que voici 8h30 qui nous appelle à déjeuner. On va cette fois au grand salon, Hornet de deux longues tables au

–Par des noirs. Après déjeuner, je fais un tour de l’avant et l’arrière montant sur le gaillard pour admirer le ciel, l’eau et la contenance de notre beau navire qui tient à merveille la mer. C’est dans ces moments-là que je me sens marin, j’adore le bord bien que ce soit bien différent cependant d’un navire de guerre.

Je suis en fort bon terme avec le commandant Anderson, encore mieux avec le second Elson, Monsieur Alison à côté duquel je prends mes repas et qui est fort amical. Je lui, je lui suis interprète, il


(manque une ligne)

A midi 1/2 la cloche...